Comment se passe la vente d’un bien en usufruit en cas de succession ?
Dans le cadre du démembrement de propriété, on distingue entre, d’une part, la nue-propriété et, d’autre part, l’usufruit. Que se passe-t-il lorsque la personne qui détient l’usufruit d’un bien immobilier vient à décéder ? Comment se passe la succession d’un bien en usufruit ?
Qu’est-ce qu’un bien en usufruit ?
Un bien est en usufruit lorsque la personne qui l’occupe jouit du bien sans en être propriétaire. Il peut s’agir d’un appartement comme d’une maison. En contrepartie, l’occupant – appelé usufruitier – doit assurer la conservation du bien immobilier. Autrement dit, il a la responsabilité de son entretien régulier.
De son côté, le nu-propriétaire dispose du bien sans pouvoir l’utiliser. Il ne peut donc ni occuper le bien, ni en tirer des loyers. Si le nu-propriétaire décide de revendre son droit de propriété, il ne peut en aucun cas céder la jouissance du bien.
Que devient le bien en cas de décès de l’usufruitier ?
De nombreuses raisons peuvent conduire à mettre un terme à l’usufruit :
- La fin du délai pour lequel l’usufruit a été initialement mis en place ;
- L’absence d’usage pendant une durée de 30 ans ;
- La renonciation à l’usufruit, la destruction de la chose sur laquelle porte l’usufruit (ex. destruction totale de l’immeuble suite à un incendie) ;
- L’abus de jouissance de l’usufruitier (ex. défaut d’entretien du logement) ;
- Le seizième anniversaire d’un enfant mettant fin à l’usufruit légal des parents ainsi que la mort de l’usufruitier.
Bon à savoir, les seules situations dans lesquelles le décès de l’usufruitier ne met pas fin à l’usufruit sont la donation de son vivant et la transmission par testament.
Comment se passe une succession avec usufruit ?
Au décès de l’usufruitier, la pleine propriété – c’est-à-dire la somme de la nue-propriété et de l’usufruit – est réunie entre les mains du nu-propriétaire. Le nu-propriétaire récupère ainsi la pleine propriété de manière gratuite et automatique. Si le nu-propriétaire vient à décéder avant l’usufruitier, les héritiers du nu-propriétaire deviennent à leur tour nus-propriétaires au moment de la succession.
Quelle est la fiscalité sur la revente d’un bien en usufruit ?
En matière de fiscalité sur la vente d’un bien en usufruit après le décès de l’usufruitier, on va s’intéresser au calcul de la plus-value immobilière (c’est-à-dire la différence entre le prix de cession et le prix d’acquisition). Ce cas de figure est en effet particulier dans la mesure où le nu-propriétaire a obtenu une décote sur le prix d’achat. Pour déterminer la fiscalité sur la vente du bien après la mort de l’usufruitier, il est nécessaire d’effectuer le calcul suivant pour estimer la valeur d’achat :
Prix d’achat = valeur en pleine propriété à la date à laquelle le bien est entré dans le patrimoine du propriétaire + frais d’acquisition (pour leur montant réel ou pour un forfait de 7,5 %) + dépenses de travaux (pour leur montant réel ou pour un forfait de 15 % si le bien est détenu depuis plus de cinq ans).
Vous pouvez ensuite déterminer le montant de la plus-value immobilière :
Montant de la plus-value = prix de vente - prix d’achat du bien.
Cette plus-value est ensuite soumise à une imposition forfaitaire à l’impôt sur le revenu de 19 % et à des prélèvements sociaux de 15,5 %.
La plus-value brute est corrigée d’un abattement pour durée de détention (au-delà de cinq ans de détention). Cet abattement est calculé à partir du barème suivant :
|
Taux d’abattement applicable chaque année de détention |
Taux d’abattement applicable chaque année de détention |
---|---|---|
Durée de détention |
Assiette pour l’impôt sur le revenu |
Assiette pour les prélèvements sociaux |
Moins de 6 ans |
0 % |
0 % |
De la 6e à la 21e année |
6 % |
1,65 % |
22e année révolue |
4 % |
1,60 % |
Au-delà de la 22e année |
Exonération |
9 % |
Au-delà de la 30e année |
Exonération |
Exonération |
Il est donc possible de bénéficier d’une exonération totale après :
- 22 années de détention pour l’impôt sur le revenu ;
- 30 années pour les prélèvements sociaux.
En cas de vente d’un bien après réunion de la propriété au décès de l’usufruitier, la date qui sert de point de départ pour le calcul de l’abattement est la date d’acquisition de la nue-propriété.
Quels sont les avantages de l’usufruit ?
Vous pouvez devenir titulaire de l’usufruit d’un bien immobilier lorsque vous vous trouvez dans une des situations suivantes :
- Vous détenez, en tant que représentant légal, l’usufruit des biens de vos enfants lorsqu’ils sont âgés de moins de 16 ans. Vos enfants sont alors nus-propriétaires des biens jusqu’à ce qu’ils atteignent l’âge de pouvoir en disposer librement et entièrement ;
- Vous êtes veuf ou veuve. Vous recevez en usufruit les biens de votre défunt époux. Les enfants du défunt deviennent, eux, nus-propriétaires des biens ;
- Vous recevez un droit d’usufruit par vente ou donation.
En tant qu’usufruitier, vous disposez de deux droits principaux :
- D’une part, le droit d’utiliser le bien. L’usufruitier peut occuper le bien lui-même. La jouissance du bien n’est aucunement remise en cause si le propriétaire décide de vendre son droit de propriété. Ce dernier ne peut en effet que céder la nue-propriété qu’il détient. Si l’usufruitier réalise des travaux d’amélioration dans le logement au moment où il a l’usage du bien, il ne peut pas réclamer d’indemnité de la part du nu-propriétaire ;
- D’autre part, le droit de percevoir les revenus tirés du bien. S’il n’utilise pas le bien pour lui-même, l’usufruitier a la possibilité de le louer et d’en tirer des revenus. Il peut s’agir de loyers s’il s’agit d’un immeuble, voire de récoltes si les biens en question sont des terres agricoles.
Quelle est la part de l’usufruitier en cas de revente ?
Le bien peut être vendu si le nu-propriétaire et l’usufruitier en conviennent. Quels sont les droits respectifs du nu-propriétaire et de l’usufruitier ? Le produit de la vente est alors réparti entre les deux parties en fonction de l’âge de l’usufruitier. Un barème fiscal permet ainsi de déterminer la part de l’usufruitier en cas de revente :
Âge de l’usufruitier |
Valeur de l’usufruit (%) |
---|---|
Moins de 21 révolus |
90 % |
Moins de 31 révolus |
80 % |
Moins de 41 révolus |
70 % |
Moins de 51 révolus |
60 % |
Moins de 61 révolus |
50 % |
Moins de 71 révolus |
40 % |
Moins de 81 révolus |
30 % |
Moins de 91 révolus |
20 % |
Plus de 91 révolus |
10 % |
Par exemple, si l’usufruitier est âgé de 74 ans au moment de la vente, il reçoit 30 % du produit de la vente. Pour un bien cédé au prix de 200 000 €, sa part est de : 30 % x 200 000 = 60 000 €. Le nu-propriétaire, pour sa part, reçoit la différence soit 140 000 €.
C’est le notaire qui se charge d’effectuer ces calculs et de réaliser les différentes démarches auprès du service des impôts. Pour l’évaluation de la quote-part de chacun, le notaire va prendre en compte le prix d’achat inscrit dans l’acte authentique.
Lorsque le bien constitue la résidence principale de l’usufruitier, il n’est pas redevable de l’impôt sur la plus-value immobilière. En ce qui concerne l’impôt sur la fortune immobilière (Ifi), c’est l’usufruitier qui le paie en règle générale. Les biens démembrés entrent en effet dans le patrimoine de l’usufruitier pour leur valeur en pleine propriété. À partir du moment où le bien est vendu, l’usufruitier n’a plus rien à déclarer au titre de ce bien. Pour rappel, l’Ifi concerne les contribuables dont le patrimoine immobilier est supérieur à 1,3 million d’euros.
Dans un achat immobilier classique, l’usufruit et la nue-propriété sont réunis pour former la pleine propriété. Lorsque le bien est démembré, ces deux composantes sont séparées. Le démembrement de propriété est l’une des possibilités qui s’offrent à vous en cas d’achat immobilier à plusieurs. Mais ce n’est pas la seule. Pour choisir la solution la mieux adaptée à votre situation, n’hésitez pas à en parler à votre notaire ou à un avocat.